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lesquelles le public adopte une réponse nouvelle tous les dix ans, parce qu’on n’en a jamais trouvé de satisfaisante.

Une chose sûre, c’est qu’après ces époques, il n’y a plus rien. Voltaire a mille mérites différents, Montesquieu nous enseigne avec tout le piquant possible la plus utile des sciences ; Buffon a parlé avec pompe de la nature. Rousseau, le plus grand d’eux tous en littérature, est le premier des Français pour la belle prose. Mais, comme littérateurs, c’est-à-dire comme gens donnant du plaisir avec des paroles imprimées, combien ces grands hommes ne sont-ils pas au-dessous de La Fontaine et de Corneille, par exemple !

Il en est de même en peinture, si vous exceptez l’irruption heureuse qui, un siècle après Raphaël et le Corrége, donna au monde le Guide, les Carrache et le Dominiquin.

La musique aura-t-elle le même sort ? Tout porte à le croire. Cimarosa, Mozart, Haydn viennent de nous quitter. Rien ne paraît pour nous consoler. Pourquoi ? me dira-t-on. Voici ma réponse : Les artistes d’aujourd’hui les imitent ; eux n’ont imité personne. Une fois qu’ils ont su le mécanisme de l’art, chacun d’eux a écrit ce qui faisait plaisir à son âme. Ils ont écrit pour eux et pour ceux qui étaient organisés comme eux.