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il fallait ouvrir le parapluie et parler constitution : les meneurs du vice-roi étaient même au-dessous de cette idée. Pour lui, il ne fut que chevalier français, le plus brave et le plus loyal des hommes ; il avait offert à son bienfaiteur l’armée d’Italie, que celui-ci eut l’aveuglement de refuser (février 1814).

Après l’abdication, le vice-roi songea enfin à la couronne. Il s’imagina qu’elle était entre les mains des sénateurs de Milan, et envoya un homme à lui acheter chez Manin, le premier bijoutier de la ville, quarante-deux tabatières de vingt-cinq louis chacune, pour corrompre les quarante-deux sénateurs. Cette manœuvre adroite fut sue dans Milan un quart d’heure après, et… Ici, mon copiste me regarde en riant : Monsieur, le temps présent est l’arche du Seigneur[1].

Le hasard ayant interrompu en 1814 la marche de ce jeune peuple, que va devenir le feu sacré du génie et de la liberté ? S’éteindra-t-il ? et l’Italie se remettra-t-elle

  1. À cette époque (avril 1814), le prince avait encore une très-bonne ligne militaire ; on vient de me répéter ces faits sur tous les tons. J’ai de nouveaux motifs pour ne point y croire. L’homme qui, après la retraite de Moscou, a fait la campagne de Magdebourg, et, avec une faible avant-garde, a arrêté le débordement des Russes et des Prussiens furieux, doit être supérieur au rôle politique qu’on lui fait jouer ici. Le vice-roi n’a jamais été parmi nous qu’un marquis français, disent mes officiers.