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ROME, NAPLES ET FLORENCE

Il y a longtemps que nous sommes convenus que la musique ne peut peindre l’esprit ; elle est obligée de prononcer lentement, et le degré de rapidité de la repartie donne presque toujours une nuance à l’idée. La musique ne peint que les passions, et que les passions tendres.

Depuis Mozart et Haydn, tandis que le chant peint une passion, des traits d’orchestre peignent d’autres nuances de sentiment, qui, je ne sais comment, viennent se confondre dans notre âme avec la peinture de la passion principale. Mayer, Winter, Weigl, Chérubini, abusent de l’accessoire, ne pouvant atteindre au principal. Mais jusqu’ici, malgré cette découverte, la musique ne peut encore atteindre l’esprit.

1er septembre. — Je retourne à Valle.

Des gens parfaitement heureux, ou des gens parfaitement insensibles, ne pourraient souffrir la musique : c’est pour ces deux raisons que les salons de Paris, en 1779, lui étaient si rebelles. Mozart fit bien de quitter la France et, sans la Nouvelle Héloïse, le Devin de Jean-Jacques eût été sifflé.

Pourquoi a-t-on du plaisir à entendre chanter dans le malheur ? c’est que, d’une manière obscure et qui n’effarouche pas