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de l’inconvénient qu’il y aurait à admettre dans le royaume deux cents têtes de bœufs provenant de l’État du pape : cette scène est digne de Molière, et avait ce soir pour nous un genre de mérite que n’a pas Molière. Tandis que nous assistons à cette scène, jouée avec des marionnettes, il n’est aucun de nous qui n’ait la conscience qu’une scène aussi plaisante dans les détails se passe actuellement à deux cents pas du salon où nous rions aux larmes. Mes amis ont même le soin de ne représenter sur leur théâtre de marionnettes que des scènes qui ont eu lieu réellement, au vu et au su de toute la haute société. En voyant l’embarras comique de ce petit personnage de douze pouces de haut, revêtu du costume de premier ministre, et auquel nous tous nous avions fait la cour le matin, le rire prenait une telle énergie chez la plupart d’entre nous, que trois fois il a fallu suspendre la représentation. Je crois que le danger de ce petit plaisir innocent en augmentait encore l’intérêt. Nous n’étions que dix-huit ; c’étaient aussi des gens de la société qui faisaient parler les marionnettes.

Le cadre de cette comédie (l’ossatura) a été fait par un abbé fort malin, qui me semble l’amant d’une des maîtresses de