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siècle. Que M. Guglielmi ne vient-il à Paris ? il y passerait tout d’une voix pour un grand homme. C’est Grétry ressuscité, et avec moins de petitesse dans la manière. Sa musique est aussi un peu perruque, qu’on me passe ce mauvais mot si pittoresque. Quelquefois Guglielmi se donne un air de fraîcheur, en volant sans façon dix ou douze mesures à Rossini. C’est Natoire ou de Troye prenant une tête au Guide.

12 février. — Voici enfin le grand jour de l’ouverture de Saint-Charles : folies, torrents de peuple, salle éblouissante. Il faut donner et recevoir quelques coups de poings et de rudes poussées. Je me suis juré de ne pas me fâcher, et j’y ai réussi : mais j’ai perdu les deux basques de mon habit. Ma place au parterre m’a coûté trente-deux carlins (quatorze francs), et mon dixième dans une loge aux troisièmes, cinq sequins.

Au premier moment, je me suis cru transporté dans le palais de quelque empereur d’Orient. Mes yeux sont éblouis, mon âme ravie. Rien de plus frais, et cependant rien de plus majestueux, deux choses qui ne sont pas aisées à réunir. Cette première soirée est toute au plaisir : je n’ai pas la force de critiquer. Je suis harassé. À demain le récit des drôles de