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Gaulois qui assuraient la liberté ; je vois au contraire dans toutes les histoires agir et vivre le peuple romain, et l’on a besoin de voir pour aimer. Voilà comment je m’explique ma passion pour les vestiges de la grandeur romaine, pour les ruines, pour les inscriptions. Ma faiblesse va plus loin : je trouve dans les églises très-anciennes des copies des temples païens. Les chrétiens, triomphants après tant d’années de persécution, démolissaient avec rage un temple de Jupiter, mais ils bâtissaient à côté une église à saint Paul[1]. Ils se servaient des colonnes du temple de Jupiter qu’ils venaient de détruire ; et, comme ils n’avaient aucune idée des beaux-arts, ils copiaient sans s’en douter le temple païen.

Les moines et la féodalité, qui sont maintenant le pire des poisons, furent d’excellentes choses en leur temps : on ne faisait rien alors par vaine théorie ; on obéissait aux besoins. Nos privilégiés d’aujourd’hui proposent à un homme fait de se nourrir de lait et de marcher à la lisière. Rien de plus absurde : mais c’est ainsi que nous avons commencé. Pour moi,

  1. Par exemple le fameux Saint-Paul hors des murs, à Rome, incendié en 1823, et que l’on va, dit-on, essayer de rebâtir au moyen d’un ordre de chevalerie dont on vendra la croix.(1826.)