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Torinieri, 3 février. — Nous avons soupé hier à Buon-Convento. La calèche avait heureusement besoin de quelques réparations ; j’ai abandonné mon ami, et suis allé m’établir dans la boutique du barbier (c’est un sacrifice que je fais à mon devoir de voyageur). J’y trouve heureusement un jeune curé des environs, beau parleur, qui, me voyant étranger, veut absolument me faire les honneurs du pays, et me céder son tour sur le grand fauteuil de cuir : j’accepte. Rien n’attache comme les bienfaits, et j’obtiens, en faisant beaucoup de frais, une heure de conversation intime avec ce jeune curé. Tantôt, en vertu de sa robe, il me dit beaucoup de mal des Français ; tantôt, en vertu de son esprit, dont il a infiniment (du raisonnable s’entend, et de l’exact, à la florentine), il porte aux nues cette administration française si raisonnable, si forte, si exacte, et qui semait sur la pauvre Italie du seizième siècle les conséquences de la civilisation du dix-huitième. Par le gouvernement de Napoléon, l’Italie sautait à pieds joints trois siècles de perfectionnements. Dans les îles de la mer Pacifique, que les Anglais