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trente pages ? Le merveilleux le plus extravagant crée des événements qui amènent les développements de passion les plus vrais et les plus imprévus. L’imagination est étonnée par la hardiesse des inventions et séduite par la fraîcheur des peintures. Un amant s’est caché dans un arbre pour regarder sa maîtresse, qui se baigne dans un petit lac ; l’enchanteur, son rival, est absent ; mais le magicien, quoique éloigné, s’aperçoit de ce qui se passe par la vive douleur que lui cause une bague ; il dit un mot, et successivement les bras, les jambes, la tête du pauvre amant tombent de l’arbre sur lequel il est perché, dans le lac. On donne ses discours à sa maîtresse et les réponses de celle-ci pendant cette punition cruelle, par exemple quand l’amant n’a plus de corps et qu’il ne lui reste que la tête, etc. Ce mélange de folie et de vérité touchante produit sur moi un effet délicieux ; il y avait des moments, en écoutant ces contes, où je me croyais au quinzième siècle. La soirée s’est terminée par de la danse. Je m’étais si bien fait petit dans la conversation, que les hommes m’ont vu sans jalousie danser avec eux et ces trois jolies paysannes jusqu’à une heure du matin. Cependant une ouverture que j’ai hasardée sur la beauté du pays, qui pourrait bien m’en-