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de la jeunesse italienne. Tout ce qui est né vers 1800 est fort bien.

Le Milanais n’est pas méchant, et il offre à cet égard la seule bonne garantie, c’est qu’il est heureux. Ce qui précède est évident, l’explication qui suit n’est que probable.

Sur cent cinquante actions, importantes ou non, grandes ou petites, dont se compose la journée, le Milanais fait cent vingt fois ce qu’il lui plaît au moment même.

Le devoir sanctionné par le malheur si l’on y manque, et contrariant son inclination actuelle, ne lui apparaît que trente fois sur cent cinquante actions.

En Angleterre, le terrible devoir, sanctionné par la perspective d’expirer de faim dans la rue[1], apparaît cent vingt fois peut-être sur cent cinquante actions. De là le malheur frappant de ce peuple qui ne manque pourtant ni de raison ni de bons usages ayant force de loi. Ce qui comble ce malheur, c’est que, parmi les gens les plus riches, le devoir, sanctionné par la peur de l’enfer que prêche M. Irving, ou par la peur du mépris si votre habit n’est pas exactement à la mode, paraît cent quarante fois peut-être sur les cent cinquante actions

  1. Sept malheureux sont morts de faim dans les rues de Londres pendant que j’y étais (1821)