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sont en architecture, et le saint Jerôme du Corrége parmi les tableaux. — « Je ne partirais jamais, lui dis-je, si j’écoutais mon penchant. J’userais tout mon congé à Milan. Je n’ai jamais rencontré de peuple qui convienne si bien à mon âme. Quand je suis avec les Milanais, et que je parle milanais, j’oublie que les hommes sont méchants, et toute la partie méchante de mon âme s’endort à l’instant. »

Je n’oublierai de ma vie la belle figure de Monti, récitant chez mademoiselle Bianca Milesi, le morceau du Dante sur Hugues Capet. J’étais sous le charme.

J’ai vu de loin M. Manzoni, jeune homme fort dévot, qui dispute à lord Byron l’honneur d’être le plus grand poëte lyrique parmi les vivants. Il a fait deux ou trois odes qui me touchent profondément, et jamais ne me donnent l’idée d’un M. de Fontanes se frottant le front pour être sublime, ou allant chez le ministre pour être fait baron. Si le degré de l’émotion qu’il produit constamment doit être la vraie mesure du mérite d’un poëte, pour moi l’auteur anonyme de Prina, ou la Vision del di d’incœu, est le plus grand poëte italien vivant. M. Thommaso Grossi est un pauvre clerc de procureur. Le seul désavantage de ce grand poëte, c’est que la langue dont il se sert n’est pas comprise