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FÉDER

trait hors de son atelier, de dire deux ou trois absurdités qui n’échappèrent point à Delangle ; il se pencha vers sa sœur et lui dit :

— Évidemment il est préoccupé, il y a dans ce salon quelqu’une de ses belles.

Aussitôt l’œil curieux de la jeune provinciale analysa les figures de chacune des femmes qui étaient présentes. L’une d’elles, qui avait de grands traits et une taille fort avantageuse, suivait tous les mouvements de notre héros avec des regards singuliers. C’était tout simplement une princesse allemande dont Féder avait fait le portrait, et qui était choquée de l’habitude qu’il avait de ne jamais saluer ses modèles, même ceux qui avaient daigné avoir avec lui la conversation la plus particulière.

Enfin, après un plaidoyer de plus de trois quarts d’heure, dont la voix criarde des deux provinciaux donna l’agrément à tout ce qui était chez Tortoni, et qui fit de cette conversation une sorte de puff pour Féder, il fut convenu que MM. Boissaux et Delangle répondraient à toutes les personnes qui leur parleraient de ce portrait qu’il était le résultat d’un pari ; ce qui expliquerait d’une manière suffisante la singulière détermination prise par Féder d’aller y travailler hors de son atelier.

— Mais j’oubliais, s’écria Féder, qui,