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RACINE ET SHAKSPEARE

et de beaucoup de tragédies mortellement ennuyeuses, n’est point du tout le chef des romantiques.

S’il se trouvait un homme que les traducteurs à la toise se disputassent également à Madrid, à Stuttgard, à Paris et à Vienne, l’on pourrait avancer que cet homme a deviné les tendances morales de son époque[1].

Parmi nous, le populaire Pigault-Lebrun est beaucoup plus romantique que le sensible auteur de Trilby.

Qui est-ce qui relit Trilby à Brest ou à Perpignan ?

Ce qu’il y a de romantique dans la tragédie actuelle, c’est que le poète donne toujours un beau rôle au diable. Il parle éloquemment, et il est fort goûté. On aime l’opposition.

Ce qu’il y a d’antiromantique, c’est M. Legouvé, dans sa tragédie d’Henri IV, ne pouvant pas reproduire le plus beau mot de ce roi patriote : « Je voudrais que le plus pauvre paysan de mon royaume pût du moins avoir la poule au pot le dimanche. »

  1. Ce succès ne peut être une affaire de parti, ou d’enthousiasme personnel. Il y a toujours de l’intérêt d’argent au fond de tous les partis. Ici, je ne puis découvrir que l’intérêt du plaisir. L’homme par lui-même est peu digne d’enthousiasme : sa coopération probable à l’infâme Beacon. Anecdote ridicule du verre dans lequel George IV avait bu.