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RACINE ET SHAKSPEARE

ou si vous êtes pétrifié par Laharpe, vous me nierez mes petits moments d’illusion parfaite.

Et j’avoue que je ne puis rien vous répondre. Vos sentiments ne sont pas quelque chose de matériel que je puisse extraire de votre propre cœur, et mettre sous vos yeux pour vous confondre.

Je vous dis : Vous devez avoir tel sentiment en ce moment ; tous les hommes généralement bien organisés éprouvent tel sentiment en ce moment. Vous me répondrez : Pardonnez-moi le mot, cela n’est pas vrai.

Moi, je n’ai rien à ajouter. Je suis arrivé aux derniers confins de ce que la logique peut saisir dans la poésie.

l’académicien. — Voilà une métaphysique abominablement obscure ; et croyez-vous, avec cela, faire siffler Racine ?

le romantique. — D’abord, il n’y a que des charlatans qui prétendent enseigner l’algèbre sans peine, ou arracher une dent sans douleur. La question que nous agitons est une des plus difficiles dont puisse s’occuper l’esprit humain.

Quant à Racine, je suis bien aise que vous ayez nommé ce grand homme. L’on a fait de son nom une injure pour nous ; mais sa gloire est impérissable. Ce sera toujours l’un des plus grands génies qui