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DE QUELQUES OBJECTIONS

lamées en or, faisaient disparaître la moindre apparence, d’un séjour champêtre. » (Je crois lire la description d’une cour chinoise).

« Après le dîner et avant l’heure du jeu, la reine, les princesses et leurs dames, roulées par des gens à la livrée du roi, dans des carrioles surmontées de dais richement brodés en or, parcouraient les bosquets de Marly, dont les arbres, plantés par Louis XIV, étaient d’une hauteur prodigieuse. »

Cette dernière ligne a été écrite par madame Campan ; il est peu probable qu’elle fût tombée sous la plume d’un écrivain du siècle de Louis XIV ; il eût pensé à quelque détail sur les broderies du dais des carrioles plutôt qu’aux grands arbres touffus et à leur ombrage. Cela n’avait aucun charme pour des grands seigneurs qui venaient d’habiter la campagne et les bois pendant un siècle.

Outre le genre sentimental qui jette un si bel éclat dans le Renégat[1] et le Génie du Christianisme, nous avons le sentiment véritable. Ce peuple-ci a découvert tout nouvellement les beautés de la nature. Elles étaient encore presque entièrement inconnues à Voltaire ; Rousseau les mit à la mode, en les exagérant avec sa rhétorique ordinaire. On en trouve le vrai sentiment dans Walter Scott, quoique ses descriptions me semblent souvent longues, surtout lors-

  1. Titre d’un roman de M. le vicomte d’Arlincourt.