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RACINE ET SHAKSPEARE

poste le manuscrit de la Vie de Rossini, ils l’auraient considéré comme un « écrit, en langue étrangère », et l’auraient traduit en beau style académique dans le goût de la préface de la République de Cicéron, par M. Villemain, ou des lettres de Stephanus Ancestor. Bonne aventure pour le libraire, qui aurait eu vingt articles dans les journaux, et serait maintenant occupé à préparer la sixième édition de son livre ; mais moi, en essayant de l’écrire de ce beau style académique, je me serais ennuyé, et vous avouerez que j’aurais fait un métier de dupe. À mes yeux, ce style arrangé, compassé, plein de chutes piquantes, précieux, s’il faut dire toute ma pensée, convenait merveilleusement aux Français de 1785 ; M. Delille fut le héros de ce style : j’ai tâché que le mien convint aux enfants de la Révolution, aux gens qui cherchent la pensée plus que la beauté des mots ; aux gens qui, au lieu de lire Quinte-Curce et d’étudier Tacite, ont fait la campagne de Moscou et vu de près les étranges transactions de 1814.

J’ai ouï parler, à cette époque, de plusieurs petites conspirations. C’est depuis que je méprise les conspirations en vers alexandrins, et que je désire la tragédie en prose : une Mort de Henri III,