Page:Stendhal - Pensées, II, 1931, éd. Martineau.djvu/27

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
26
pensées

D’un autre côté, si Faure arrive à Paris qu’il vienne au Caveau et qu’en lui montrant Pascal, je lui dise : « Voilà un garçon qui s’embrouille par son propre tapage, à force de vouloir se donner un air d’aisance », il est possible qu’il fléchisse les traits de Pascal à mon jugement, et qu’après avoir remarqué lui-même la vérité de mon jugement il en vienne à dire : « ses traits expriment bien son caractère », quoique peut-être ils en expriment un tout opposé.

Ces deux traits, dont le deuxième indique l’existence du pouvoir de la prévention, et le premier le manque d’effet par le trop, peuvent servir à déterminer ce qu’on appelle la perspective du théâtre.

Je compare ma comédie à une statue en terre, quand en répondant aux deux questions de la page précédente j’aurai trouvé un trait propre à peindre Charles ou Chamoucy je l’ébaucherai en le mettant en place, le liant à l’action, et me figurant le dialogue qu’il doit produire ; alors je m’interrogerai et me demanderai quel effet ce trait produirait sur moi, si j’étais au parterre, et que je ne connusse pas la pièce. C’est comme le sculpteur supposant qu’une masse de cheveux sur le front, ou un morceau de draperie, ajoutera à l’effet de sa figure, flaque une poignée de terre