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LE RIRE

est donc une bonne prédisposition dans l’homme qui doit goûter une plaisanterie. Les gens d’esprit sont insouciants, sous un Louis XVI, du temps de M. de Maurepas, et non pas en Angleterre, sous le mmistère de Pitt ou de Fox.

Un avare, qui passe sa vie à craindre, ne peut rire.

Un sage philosophe, qui passe sa vie à se mépriser soi-même et les autres hommes, ne peut pas rire. Que voit-il dans le charmant récit du combat que Falstaff fait au prince Henri ? Un plat mensonge, fait pour un vil intérêt d’argent, une misère de plus de la pauvre nature humaine. Au lieu d’en rire, il en fait une grimace triste.

La nation française est vive, légère, souverainement vaniteuse, surtout les Gascons et les gens du Midi. Cette nation semble faite exprès pour le rire, au contraire de l’italienne, nation passionnée, toujours transportée de haine ou d’amour, ayant autre chose à faire que de rire.

La république, ou les intérêts de la ville, ont occupé l’Italie, de l’an 900 jusqu’au quinzième siècle. Peut-être, avant les Romains, la forme républicaine avait déjà façonné les mœurs de ce pays.

La royauté est, au contraire, bien ancienne en France. Nous la voyons renaître