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— Ces occasions, ma chère amie, qui font ou défont la fortune d’une maison, se présentent une fois dans la vie, et elles se présentent d’une façon plus ou moins commode. La montée au temple de la Fortune qui se présente à vous est une des moins épineuses que j’aie vues. Mais aurez-vous du caractère ? Car enfin, la question se réduit de votre part à ce dilemme : Aurai-je confiance en M. Leuwen, que je connais depuis quinze ans ? Pour répondre avec sang-froid et sagesse, dites-vous : Quelle idée avais-je de M. Leuwen et de la confiance qu’il mérite il y a quinze jours, avant qu’il fût question de ministère et de transaction politique entre lui et moi ?

— Confiance entière ! dit madame Grandet avec soulagement, comme heureuse de devoir rendre à M. Leuwen une justice qui tendait à la faire sortir d’un doute bien pénible, confiance entière !

M. Leuwen dit, de l’air qu’on a en convenant d’une nécessité :

— Il faut que sous deux jours au plus tard je présente M. Grandet au maréchal.

— M. Grandet a dîné chez le maréchal il n’y a pas un mois, dit madame Grandet d’un ton net et piqué.

« J’ai fait fausse route avec cette vanité