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en toute hâte : on a inséré dans la dernière lettre une feuille du brouillon biffée par le ministre.

— Voici votre lettre, dit le chef de bureau ; je ne l’ai pas encore lue. Remportez-la si vous voulez, mais rendez-la-moi avant mon travail de demain, à dix heures.

— Si c’est une page du milieu, j’aime mieux l’enlever ici, dit Lucien.

— Voici des grattoirs, de la sandaraque, faites à votre aise.

Lucien se mit à une table.

— Eh bien ! votre grand travail sur les préfectures après les élections avance-t-il ? J’ai un cousin de ma femme sous-préfet à *** pour lequel on nous a promis Le Havre ou Toulon depuis deux ans…

Lucien répondit avec le plus grand intérêt et de façon à obliger le chef de bureau de la police militaire. Pendant ce temps, il recopiait la feuille du milieu de la lettre signée comte de Vaize. La phrase relative au général Fari était l’avant-dernière du verso à droite. Leuwen eut soin de ne pas serrer ses mots et ses lignes, et fit si bien qu’il supprima les sept lignes relatives au général Fari sans qu’il y parût.

— J’emporte notre feuille, dit-il au chef de bureau après un travail de trois quarts d’heure.