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ces messieurs. Leur digne chef, M. N…[1], était à dix pas de là, à une fenêtre de l’entresol, et criait : « Ce petit homme chauve est un agitateur. » Je me sauvai par la rue des Colonnes.

En arrivant à la porte de Caen, on examina pendant dix minutes les passeports des deux voyageurs, et, comme Leuwen se fâchait, un homme d’un certain âge, grand et fort, et badinant avec un énorme bâton, et qui [se] promenait sous la porte l’envoya faire f… en termes fort clairs.

— Monsieur, je m’appelle Leuwen, maître des requêtes, et je vous regarde comme un plat. Donnez-moi votre nom, si vous l’osez.

— Je m’appelle Lustucru, répondit l’homme au bâton en ricanant et tournant autour de la voiture. Donnez mon nom à votre procureur du roi, monsieur l’homme brave. Si jamais nous nous rencontrons en Suisse, ajouta-t-il à voix basse, vous aurez autant de soufflets et de marques de mépris que vous pouvez désirer pour obtenir de l’avancement de vos chefs.

— Ne prononce jamais le mot honneur, espion déguisé !

— Ma foi, dit Coffe en riant presque, je serais ravi de vous voir un peu bafoué

  1. Modèle : M. d’Argout.