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tera Nancy, ou du moins il n’ira plus chez madame de Chasteller. C’est, ce me semble, ce que vous désirez, et ce que je vous ai montré que vous n’obtiendriez pas par un duel[1]. »

Il fallut répéter cela en termes différents pendant une heure. Les deux commissaires prétendaient que leur droit, comme leur devoir, étaient de savoir un secret.

— Quel rôle jouerons-nous, disait Sanréal, si ces messieurs qui nous attendent dans mon salon apprennent que nous sommes restés ici une heure entière pour ne rien apprendre ?

— Eh bien ! laissez croire que vous savez, dit froidement Du Poirier ; je vous seconderai.

Il fallut encore une bonne heure pour faire accepter ce mezzo termine à la vanité de ces messieurs.

Le docteur Du Poirier se tira bien de cette épreuve de patience, au milieu de laquelle son orgueil jouissait. Il aimait surtout à parler et à avoir à convaincre des personnages ennemis. C’était un homme d’un extérieur repoussant mais d’un esprit ferme, vif, entreprenant. Depuis qu’il se mêlait d’intrigues politiques, l’art de guérir, où il avait obtenu

  1. Exprès cette grossièreté.