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examen de conscience

le plus élevé, ce qui obligeait Julien à aller chercher la plus grande des deux échelles. Julien avait approché l’échelle ; il avait cherché le volume, il le lui avait remis, sans encore pouvoir songer à elle. En remportant l’échelle, dans sa préoccupation il donna un coup de coude dans une des glaces de la bibliothèque ; les éclats, en tombant sur le parquet, le réveillèrent enfin. Il se hâta de faire des excuses à mademoiselle de La Mole ; il voulut être poli, mais il ne fut que poli. Mathilde vit avec évidence qu’elle l’avait troublé, et qu’il eût mieux aimé songer à ce qui l’occupait avant son arrivée, que lui parler. Après l’avoir beaucoup regardé, elle s’en alla lentement. Julien la regardait marcher. Il jouissait du contraste de la simplicité de sa toilette actuelle avec l’élégance magnifique de celle de la veille. La différence entre les deux physionomies était presque aussi frappante. Cette jeune fille, si altière au bal du duc de Retz, avait presque en ce moment un regard suppliant. Réellement, se dit Julien, cette robe noire fait briller encore mieux la beauté de sa taille. Elle a un port de reine ; mais pourquoi est-elle en deuil ?

Si je demande à quelqu’un la cause de ce deuil, il se trouvera que je commets encore une gaucherie. Julien était tout à fait sorti