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amener sa calèche, lui dit cet homme. Il espère qu’après avoir lu cette lettre, il vous conviendra de partir pour Paris, dans quatre ou cinq jours. Je vais employer le temps que vous voudrez bien m’indiquer à parcourir les terres de M. le marquis, en Franche-Comté. Après quoi, le jour qui vous conviendra, nous partirons pour Paris.

La lettre était courte :

« Débarrassez-vous, mon cher monsieur, de toutes les tracasseries de province, venez respirer un air tranquille, à Paris. Je vous envoie ma voiture, qui a l’ordre d’attendre votre détermination, pendant quatre jours. Je vous attendrai moi-même, à Paris, jusqu’à mardi. Il ne me faut qu’un oui, de votre part, monsieur, pour accepter, en votre nom, une des meilleures cures des environs de Paris. Le plus riche de vos futurs paroissiens ne vous a jamais vu, mais vous est dévoué plus que vous ne pouvez croire, c’est le marquis de La Mole. »

Sans s’en douter, le sévère abbé Pirard aimait ce séminaire, peuplé de ses ennemis, et auquel, depuis quinze ans, il consacrait toutes ses pensées. La lettre de M. de La Mole fut pour lui comme l’apparition du chirurgien chargé de faire une opération cruelle et nécessaire. Sa destitution était certaine. Il donna rendez-vous à l’intendant, à trois jours de là.