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celle-ci de chiffres et de calculs. Nous n’aurons que vingt mille livres de rente, lui dit-il, pour vivre tous trois à Naples, Fabrice, vous et moi. Fabrice et moi nous aurons un cheval de selle à nous deux. Le ministre venait à peine d’envoyer sa lettre, lorsqu’on annonça le fiscal général Rassi ; il le reçut avec une hauteur qui frisait l’impertinence.

— Comment, monsieur, lui dit-il, vous faites enlever à Bologne un conspirateur que je protège, de plus vous voulez lui couper le cou, et vous ne me dites rien ! Savez-vous au moins le nom de mon successeur ? est-ce le général Conti, ou vous-même ?

Le Rassi fut atterré ; il avait trop peu d’habitude de la bonne compagnie pour deviner si le comte parlait sérieusement ; il rougit beaucoup, ânonna quelques mots peu intelligibles ; le comte le regardait et jouissait de son embarras. Tout à coup le Rassi se secoua et s’écria avec une aisance parfaite et de l’air de Figaro pris en flagrant délit par Almaviva :

— Ma foi, monsieur le comte, je n’irai point par quatre chemins avec Votre Excellence : que me donnerez-vous pour répondre à toutes vos questions comme je ferais à celles de mon confesseur ?

— La croix de Saint-Paul (c’est l’ordre