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sache que cette inondation a été faite par toi, ni ordonnée par moi. Fabrice, le comte lui-même, doivent ignorer cette folle plaisanterie… Mais j’oubliais les pauvres de Sacca ; va-t’en écrire une lettre à mon homme d’affaires, que je signerai ; tu lui diras que pour la fête de ma sainte patronne il distribue cent sequins aux pauvres de Sacca et qu’il t’obéisse en tout pour l’illumination, le feu d’artifice et le vin ; que le lendemain surtout il ne reste pas une bouteille pleine dans mes caves.

— L’homme d’affaires de madame ne se trouvera embarrassé qu’en un point ; depuis cinq ans que madame a le château, elle n’a pas laissé dix pauvres dans Sacca.

Et de l’eau pour les gens de Parme ! reprit la duchesse en chantant. Comment exécuteras-tu cette plaisanterie ?

— Mon plan est tout fait ; je pars de Sacca sur les neuf heures, à dix et demie mon cheval est à l’auberge des Trois Ganaches, sur la route de Casal-Maggiore et de ma terre de la Ricciarda ; à onze heures je suis dans ma chambre au palais, et à onze heures et un quart de l’eau pour les gens de Parme, et plus qu’ils n’en voudront, pour boire à la santé du grand coupable. Dix minutes plus tard je sors de la ville par la route de Bologne. Je fais, en passant, un profond salut à la citadelle,