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probablement un crime pour lequel je suis à peu près payé d’avance ; tertio, je venge les premiers coups humiliants qu’ait reçus le chevalier Rassi. La nuit suivante, il communiqua au comte Mosca toute sa conversation avec le prince.

Le comte faisait en secret la cour à la duchesse ; il est bien vrai qu’il ne la voyait toujours chez elle qu’une ou deux fois par mois, mais presque toutes les semaines, et quand il savait faire naître les occasions de parler de Fabrice, la duchesse, accompagnée de Chekina, venait, dans la soirée avancée, passer quelques instants dans le jardin du comte. Elle savait tromper même son cocher, qui lui était dévoué et qui la croyait en visite dans une maison voisine.

On peut penser si le comte, ayant reçu la terrible confidence du fiscal, fit aussitôt à la duchesse le signal convenu. Quoique l’on fût au milieu de la nuit, elle le fit prier par la Chekina de passer à l’instant chez elle. Le comte, ravi comme un amoureux de cette apparence d’intimité, hésitait cependant à tout dire à la duchesse ; il craignait de la voir devenir folle de douleur.

Après avoir cherché des demi-mots pour mitiger l’annonce fatale, il finit cependant par lui tout dire ; il n’était pas en son pouvoir de garder un secret qu’elle lui