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DE L’AMOUR

que je n’ai pas la fièvre ? — Ma foi, je ne m’y connais pas ; mais voilà Goncelin qui se fait, à sa campagne, le médecin de ses paysans ; il doit se connaître à la fièvre : il vous le dira. » Je lui tâtai le pouls : « Pas le moins du monde, lui dis-je. — C’est singulier, reprit-elle ; je suis toute je ne sais comment ; il me semble que je vais me trouver mal. Tenez, voilà que je vais me trouver mal ; j’étouffe, desserrez-moi, M. Gustave, desserrez-moi. Goncelin, je vous en prie, allez chercher dans l’appartement de mon mari… — Quoi ? — Du benjoin, pour le brûler ; il y en a dans son médailler. — Je sais où il est, dit Weilberg ; j’y vais. Goncelin va vous aider ; je retourne dans l’instant. » Et il revint cinq minutes après.

Je m’étais amusé à la délacer. La figure à part, elle était bien, jeune, bien faite, la peau blanche et douce. Je lui avais découvert la poitrine ; elle se serait laissé mettre toute nue. J’usais passablement de la partie découverte, et je lui disais : « Votre cœur bat très doucement ; n’ayez pas peur, ce n’est absolument rien. » Elle jouait un évanouissement modéré. Weilberg, qui faisait exprès d’être longtemps dehors, rentra à la fin, posa le benjoin sur la cheminée, et se remit tranquillement à manger des biscuits et à avaler des tasses de thé.