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Le courage de l’Italien est un accès de colère, le courage de l’Allemand un moment d’ivresse, le courage de l’Espagnol un trait d’orgueil. S’il y avait une nation où le courage fût souvent une pique d’amour-propre entre les soldats de chaque compagnie, entre les régiments de chaque division, dans les déroutes comme il n’y aurait plus de point d’appui l’on ne saurait comment arrêter les armées de cette nation. Prévoir le danger et chercher à y porter remède serait le premier des ridicules parmi ces fuyards vaniteux.

« Il ne faut qu’avoir ouvert une relation quelconque d’un voyage chez les sauvages de l’Amérique-Nord, dit un des plus aimables philosophes français[1], pour savoir que le sort ordinaire des prisonniers de guerre est, non pas seulement d’être brûlés vifs et mangés, mais d’être auparavant liés à un poteau près d’un bûcher enflammé, pour y être pendant plusieurs heures tourmentés par tout ce que la rage peut imaginer de plus féroce et de plus raffiné. Il faut lire ce que racontent de ces affreuses scènes les voyageurs témoins de la joie cannibale des assistants, et surtout de la fureur des femmes et des enfants, et de leur plaisir atroce à rivaliser de cruauté. Il faut

  1. Volney, Tableau des États-Unis d’Amérique, p. 491-496.