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forcé de s'exiler ; il se retire à la campagne, où, n'ayant rien à faire, il compose, pour se désennuyer, the Paradise lost ¹

On acquiert un grand esprit, non pas en apprenant beaucoup par cœur, mais en comparant beaucoup les choses qu'on voit ; il faut beaucoup méditer, et quoi qu'on voie, tâcher d'en savoir la cause.

Les Athéniens exilent Aristide, le méri­tait-il ? Ou, s'ils en étaient jaloux, pour­quoi en étaient-ils jaloux ?

En société, qui sait le plus de traits d'histoire, de bons mots, d'anecdotes curieuses, est le plus agréable. Buffon, Corneille, La Fontaine ne s'abaissaient pas à tout cela ; aussi on était étonné de ne pas les voir briller en société ; les badauds s'en étonnaient, ils ne faisaient pas attention que l'esprit qui vous fait admi­rer par la postérité est très différent de celui qui vous rend amusant dans un cercle.

Je puis te donner comme des vérités générales :

1e Que toutes nos idées nous viennent par nos sens ;

2e Que la finesse plus ou moins grande des cinq sens ne donne ni plus ni moins d'es­prit. Homère, Milton étaient aveugles ; Mon­tesquieu, Buffon avaient la vue très basse ;

1. Le Paradis perdu.