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jetés dans les bras l'un de l'autre, les secs nous sont trop insupportables.

Pour les secs, nous ne pouvons espé­rer de les faire contribuer à notre bon­heur qu'en leur montrant le leur dans les mêmes objets. Pour cela, il faut acquérir de la séduction dans l'esprit, c'est là où (siècle de François 1er) les femmes brillent. Car tu trouveras des secs si sots, que tu auras toutes les peines du monde à leur faire faire les choses qui leur sont avan­tageuses et à toi aussi ; tu sens que, pour ces secs, la tristesse d'une grande âme. quand même elle leur serait intelligible, est d'un ennui mortel (elle ne leur est pas intelligible), parce que, pour avoir pitié, il faut se mettre à la place et ils ne se reconnaissent pas dans nous. On voit tuer une mouche sans peine, on frémit de voir mater un bœuf ; ce serait bien pis si on voyait- tuer un orang-outang. Il faut donc se faire un système de gaieté avec ce vulgaire, étudier ce qui les fait rire, sans nous peindre à leurs yeux d'une ma­nière supérieure, et par conséquent offen­sante. Ôuand nous aurons cette bonne habitude, nous n'aurons plus qu'à acqué­rir de la fortune pour être maîtres de notre destin autant qu'un homme peut l'être.

Je suis bien loin de mettre tout cela en pratique ; peut-être se passera-t-il bien