Page:Stendhal - Correspondance, I.djvu/170

Cette page n’a pas encore été corrigée

Mon père m'a fait promettre, lorsque je le quittai pour la première fois, il y a six ans, que je ne me marierais pas avant trente ans.

Actuellement je n'avais d'ambition que pour elle ; quel motif aurais-je donc pour prendre un état? et quel état pourrais-je commencer ? Je suis tout à fait dégoûté des femmes, jamais aucune d'elles ne sera plus ma maîtresse, et celles qu'on a par calcul m'ennuient. Je prise peu l'estime d'une société particulière, parce que j'ai vu qu'en flattant tous ceux qui la com­posent on était sûr de l'obtenir. J'aurai trois ou quatre mille livres de rente, c'est assez pour vivre. Si j'étais ruiné, avec un an de travail je pourrais devenir pro­fesseur de mathématiques. Quel motif ai-je donc pour m'en aller par le monde flatter de la voix et de la conduite tous les hommes puissants que je rencontrerai ?

Je sens que j'aimerais vivement la gloire, si je parvenais à me guérir d'un autre amour. Il y a la gloire militaire, la gloire littéraire, la gloire des orateurs dans les Républiques. J'ai renoncé à la première parce qu'il faut trop se baisser pour arriver aux premiers postes, et que ce n'est que là que les actions sont en vue. Je ne suis pas savant, il ne faut donc pas penser à la deuxième. Reste la troisième carrière, où le caractère peut en partie