Page:Stanley - Comment j'ai retrouvé Livingstone, version abrégée Belin de Launay, 1876.djvu/122

Cette page n’a pas encore été corrigée

quatre mètres à la fois ; et, bondissant comme des balles élastiques, elles disparurent derrière un tertre.

Mon succès fut salué par les acclamations de mes soldats, que le bruit du fusil avait fait accourir. Celui qui portait mon arme de rechange planta son couteau dans la gorge du springbok, en prononçant un fervent « bismillah ! » En un clin d’ œil, il eut presque détaché la tête.

Après avoir suivi la rive du Gombé pendant plus d’un kilomètre, repaissant mes yeux de la vue d’un long espace rempli d’eau, vue à laquelle j’étais étranger depuis si longtemps, je me trouvai tout à coup en face d’un tableau qui me ravit jusqu’au fond de l’âme : six, sept, huit, dix zèbres jouaient et se mordillaient les uns les autres, fouettant de leurs queues leurs belles robes tigrées, à une distance de moins de cinquante pas. Scène pittoresque, toute locale ; jamais je n’avais si bien compris que j’étais au centre de l’Afrique. J’eus un moment de fierté en me sentant possesseur d’un si vaste domaine, peuplé de si nobles bêtes. J’avais là, à portée de ma balle, les animaux les plus divers, l’orgueil des forêts africaines. Je pouvais choisir entre eux ; ils m’appartenaient. Ils étaient à moi, sans bourse délier, sans débat et sans conteste. Malgré cela, je baissai deux fois ma carabine ; il me répugnait de frapper ces bêtes royales. Cependant j’en tuai un ; mais je m’en tins là, parce qu’il me semblait suffisant, surtout après une longue marche, d’avoir abattu en un jour un zèbre et un spingbok.

Comme tout m’engageait à prendre un bon bain, j’avisai une place ombreuse, sous un mimosa à large