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MAROUSSIA

« Lâche ! dit le petit frère aîné. Lâche ! quand je serai grand !… »

Le vilain homme à la figure rouge avait autre chose à faire que de l’entendre. D’un second coup de pied il avait fait lever Krouk, qui paraissait comme ivre de sommeil, et ouvrait et refermait alternativement, dans un pénible effort, des yeux ébahis.

Vorochilo, réveillé par les mêmes procédés, avait l’air de ne savoir que penser en regardant ses agresseurs. Il appelait le gros officier le compère Générasime, et l’autre le compère Stéphane ; il adressait à l’un un sourire, à l’autre un clignement d’yeux de bonne amitié, puis retombait sur son banc en disant :

« Couchons-nous, il est l’heure. »

Les soldats le regardaient tour à tour :

« C’est lui, disaient les uns. Ce n’est pas lui, disaient les autres. Quel peuple de coquins ! Il n’en est pas un qui ne soit un traître.

— Silence ! » cria l’homme à la figure rouge.

Il s’était assis à une table, et faisant un signe brutal à la maîtresse de la maison :

« Approche, » lui dit-il.

Elle approcha.

« Qui es-tu ? demanda-t-il.

— Je suis la femme de Danilo Tchabane.

— Où est ton mari ?

— Il est allé voir un ami.

— Attends, je vais t’apprendre ce que c’est qu’un