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328 ÉTUDES SUR LÀ LITTÉRATURE SANSCRITE.

celui que la nature leur assigne. Seulement dans celles de la Grèce on ne voit guère paraître l'éléphant ni le perroquet, puisque ces animaux appartiennent plus exclusivement à l'Orient. Si, dans les apologues indiens, le chacal remplace le renard des fables ésopiques, c'est une affaire d'analogie ; l'àne s'y montre stupide comme dans les fables grecques, par imitation, tandis que, dans certains mythes réellement hindous, il est irascible, lascif et en commerce familier avec la mort et les démons.

Arrivant au détail, M. Weber montrait que la fable indienne de Y Ane revêtu de la veau du lion était mentionnée dans le Cratyle de Platon et chez Lucien, et qu'elle n'était pas sans rapport avec la légende des oreilles du roi Midas. En étu- diant celle de la Tortue et celle du Chien qui lâche sa proie pour l'ombre dans le Pantcha-Tanlra et chez Babrius ou chez Phèdre, il constatait, d'après Stobée, que ce dernier sujet était connu en Grèce du temps de Démocrite. Celle du Voyageur protégé contre une écrevisse par un serpent lui rappelait un récit d'Esope et la tradition, alléguée par Elien à propos de l'inimitié naturelle du serpent et de l'écrevisse ; celle de la Souris métamorphosée en fille se retrouvait dans les deux langues. Quoique celle du Rat qui délivre le lion pris dans les filets fit partie du Mâhûbhârata; quoique celle des Trois brahmanes, ressuscitant un lion mort qui les déchire ensuite, parût à M. Wagener avoir inspiré le récit de l'Homme et la Couleuvre, M. Weber n'en persistait pas moins à croire à l'autorité des textes grecs, sous prétexte qu'ils sont beaucoup plus secs et plus nus que les textes indiens. Disons que cet axiome de critique, par lequel on jugerait de l'antiquité d'un ouvrage en raison de sa simplicité, nous semble assez contes- table. Le goût si délicat des Hellènes ne peut-il pas avoir abrégé et simplifié les inspirations, toujours si complexes et si diffuses, de la littérature sanscrite? Qu'y aurait-il eu de surprenant à ce qu'Esope eût résumé les inventions de Bidpaï? La concision de Babrius ou de Phèdre prouve-t-elle

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