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Une douleur, créée invincible et féconde,
Avant l’ange et le ciel, avant l’homme et le monde,
Pour tout ce qui fléchit sans cesse combattant,
Et d’un calvaire à l’autre agrandie en montant.

Aux longs cris des vautours et des pâles orfraies,
La géhenne, à présent, vient boire aux quatre plaies :
Calices mesurés à ces gouffres de feu,
Larges coupes du vin où fermente le Dieu,
Et qui doivent, avant l’heure de délivrance,
Jeter à chaque enfer son fleuve d’espérance !
Coupes du Golgotha, rayonnante boisson,
Que verse de si haut le mourant échanson.
Sur ce peuple et ces rois, ces hydres et ces flammes,
Esprits, fantômes, corps, larves, archanges, âmes,
Qui regardaient la nuit et vivaient dans la mort,
Avant d’être attirés sur le seuil du remord.

Comme au trépas du Christ tressaillit notre terre,
Sous le flot qui le lave et qui le désaltère
Tressaille, en ses replis, l’infernal univers.
Un soupir confus sort des tombeaux entr’ouverts :
Il n’est pas la prière, il n’est pas le blasphème,
La voix qui dit—je hais, —ni la voix qui dit—j’aime.
Oh ! qu’avec ces longs bruits exhalés par milliers
Les échos de l’abîme étaient peu familiers !

Idaméel frémit en secouant lui-même
Le sang qui vient bénir son drapeau d’anathème.
Les sujets et le roi ne se comprennent plus.
Prêt à voir s’éclipser ses rêves absolus,
Il se souvient du monde et de son agonie ;