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Et par un souffle froid saisis à l’unisson,
Nous nous sentons mourir sous le même glaçon.
Tous deux, l’un de clartés et l’autre d’amour vide,
Nous penchons vers la nuit notre spectre livide ;
Mais le sort nous destine un tombeau différent,
Et je n’abdique pas sitôt que lui mou rang !
Dormons… Mon cœur est lourd, et soulève avec peine,
Pour ses derniers soupirs, le fardeau de sa haine !
Voir mourir l’univers flatte peu mon désir :
Laissons au Créateur ce sublime plaisir.
Dormons… Toi qui voulais ma Sémida pour mère
Idaméelpolis, n’appelle plus ton père !
Attends loin de mes yeux l’universel trépas.
Tes autels maintenant ne me suffiraient pas,
Car j’ai pris, délaissant ta grandeur abattue,
L’Arar pour piédestal, sans changer la statue !
Que ferais-tu de moi ? nos espoirs sont trahis.
Meurs ainsi que mourut ton aïeule Sais ;
Sa déesse aujourd’hui lève son voile austère,
Et c’est pour en couvrir les astres et la terre.

Dormons… Mais est-ce un rêve enfanté par l’effroi ?
La résurrection fourmille autour de moi !…
A son appel vengeur nul mort ne se dérobe ;
Le soc du jugement sillonne notre globe.
Ainsi qu’un laboureur, à sa tâche animé,
Cueille en espoir l’épi sous la glèbe enfermé :
Déjà tout orgueilleux de ses moissons nouvelles,
L’ange exterminateur aligne ses javelles ;
Et chaque grain fleurit pour l’ombre ou la clarté,
Et voit germer de lui son immortalité.
Comme en un sol fécond chaque œuvre ensemencée