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De notre course ailée elle prenait les rênes.
Je la voyais avec la majesté des reines,
Commander à la foudre, échapper en volant
Au choc de l’avalanche et du rocher croulant ;
S’enivrer de vitesse, et de cimes en cimes,
Glisser sur l’arc-en-ciel qui joignait deux abîmes.
Cèdres déracinés ! palmiers ! pins frémissants !
Vous balanciez sur nous votre hymne à mille accents !
Et vous faisant gémir comme une immense lyre,
L’ouragan respiré doublait notre délire.
II me semblait alors que la voix d’un amant
Résonnait dans son cœur plus haut que son serment.
Sa fierté réclamait sa part de mes conquêtes ;
Elle adorait en moi le vainqueur des tempêtes ;
Et je sentis un jour les lèvres de l’enfant
Baiser la royauté sur mon front triomphant.
O combien ma puissance exaltait son ivresse !
Qu’il est doux d’être un dieu pour faire une déesse !
Pour la voir, oubliant jusques à sa beauté,
Réfléchir dans ses yeux notre divinité !
Pour jouir du rayon qui la métamorphose,
Pour emporter l’amour dans notre apothéose !!!

Et cependant, ainsi qu’un remords obstiné,
Le lion sans regards, au sépulcre enchaîné,
S’agitait dans ses fers et dans sa haine ardente,
Du tombeau paternel voix lointaine et stridente.

Et de l’ivresse aux pleurs passant en un moment,
Reprochant au bonheur son éblouissement,
Je voyais Sémida de mon ciel redescendre :
L’or pur de ses cheveux s’effaçait sous la cendre.