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Pour soumettre à ma loi l’instrument invincible,
J’appelle avec mystère un démon invisible :
Génie aux yeux mourants, esprit de volupté
Que l’abîme adorait sous le nom d’Astarté.
« A cette sombre harpe enchaîne-toi, lui dis-je ;
« Transforme, en l’habitant, le sinistre prodige ;
« Viens… » Et déjà trois fois les cordes ont gémi ;
La harpe avec terreur s’ouvre à son ennemi,
Prend son souffle, et déjà prête à chanter ma gloire,
Sent son captif vainqueur régner sur son ivoire.

Combien j’ai tressailli quand, pour l’hymne du soir,
Sous l’arbre des concerts Sémida vient s’asseoir ;
Prie avant de chanter, et pâle, inconsolée,
Contemplant cette harpe en secret violée,
Ignorant quel démon vit dans ses fibres d’or,
L’approche de son cœur, sans l’éveiller encor.


PRIÈRE DE SÉMIDA.


« Avant que Jésus-Christ nous léguât son génie,
« Les eaux étaient bornés et la terre infinie ;
« Toujours quelque géant luttait contre les Dieux.
« L’homme, déshonorant son berceau radieux,
« S’endormait dans sa chair sans espoir et sans flamme,
« Comme en son lit fangeux s’endort l’hippopotame ;
« Et de rêves impurs peuplait son lourd sommeil,
« A faire reculer les coursiers du soleil !

« Mais un doux messager nous porta la prière.
« L’âme de l’univers changea de sanctuaire ;