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Son grand front transparent que rien n’a pu ternir,
Rayonnait face à face avec son avenir ;
Réfléchissant au loin, pendant l’épreuve auguste,
La blanche vision de la tombe du juste.
On eût dit qu’au vieillard Dieu s’était découvert,
Et tenait sur la mort le paradis ouvert.
On eût dit que son œil, libre enfin de tous voiles,
Voyait ses actions, comme un groupe d’étoiles,
Monter vers le Seigneur qui disait : — Je t’attends. —
Il semblait s’éblouir de ses derniers instants.
Déjà le roi futur contemplait son royaume.
Comme Dominiquin vit mourir saint Jérôme,
Cette large agonie à mes yeux s’étala :
Le lion et le saint et l’hostie étaient là.
Et j’admirai de loin l’extase surhumaine
De l’immortalité rentrant dans son domaine !…

Le lion familier était venu d’un bond
Prosterner le désert aux pieds du moribond ;
Pour l’antre de la mort il avait fui son antre.
Sous la roche avancée où l’ombre se concentre,
C’était beau de le voir, triste et baissant son œil,
Rêver, ainsi qu’un homme, aux choses du cercueil !
C’était beau de le voir d’une haleine tiédie
Rendre un peu de chaleur à la chair refroidie.
Son souffle répondait aux aspirations.
Les prophètes toujours ont charmé les lions !
C’était beau de le voir s’allongeant sur le sable,
Tendre pour oreiller sa tête caressable
A son maître expirant qui cherchait un appui,
Quand sa fille nouait ses bras autour de lui.
Le vieillard se coucha sur la crinière fauve.