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Il saisit l’orbe d’or rayonnant dans ma main ;
Et faisant vers le ciel un geste expiatoire,
Contre un roc de l’Arar écrasa ma victoire :
Ce globe où le secret de vie était gravé,
Oeuf d’aigle où sous mon œil un monde était couvé !
Puis appelant sa fille, il lui dit à voix haute :
« A ton hymen sacré Dieu convia notre hôte ;
« Que cet hymen s’achève, ici même, à ses yeux ;
« La lutte recommence entre l’homme et les cieux.
« L’arche au mont du salut vient d’être violée :
« Seconde arche de vie, au monde sois voilée !
« Ma fille, éteins en toi tout souvenir mortel,
« Élève l’holocauste au niveau de l’autel.
« Sur le vaste cercueil Dieu te marqua d’un signe ;
« Notre sainte agonie attend ton chant de cygne !
« Sois une voix bénie en l’effrayant concert
« Que donne la nature au maître qu’elle sert.
« Eve des derniers jours, seule vierge féconde,
« Ce voile sur ta tête est le linceul du monde !
« Pour conduire le deuil universel, enfant,
« Attache-le toi-même à ton front triomphant ;
« Et marche avec respect, sous ses longs plis funèbres,
« Quand la mort alentour doublera leurs ténèbres.
« Si tu méconnaissais l’esprit qui règne en toi,
« Mes malédictions… —Père, bénissez-moi !… »

Et je vis, tel qu’un Dieu sorti du sanctuaire,
Le vieillard déployer le voile mortuaire ;
Et ce voile ennemi, dernier de ses présents,
Tomber, avec la nuit, sur ce front de seize ans.
Et je vis Sémida., victime belle et pâle,
Achever en chantant la fête sépulcrale,