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« Et dans tous ses amours il n’embrasse que lui ;
« Et son spectre vengeur, qu’à lui-même il oppose,
« Sous tous les points du ciel, pour l’effrayer, se pose.
« Laisse tous ses trésors à la sainte douleur,
« Le crime est ici-bas notre unique malheur.
« —Aux vents des passions lorsque l’homme chavire,
« J’accuse l’ouragan et non pas le navire,
« Vieillard ! l’orage en feu bat et poursuit nos jours ;
« Faut-il lutter sans cesse ? — Oui. Pour vaincre toujours
« L’homme a le souvenir de sa grandeur première,
« Et la liberté, sœur de la belle lumière !
« Quelquefois, mes enfants, un chasseur inconnu
« Contre un tigre, au désert, s’avance seul et nu.
« Nul fer n’arme sa main ; mais comme la tempête,
« Un lacet tourne et gronde au-dessus de sa tête.
« Avant de commencer le combat hasardeux,
« Le tigre et le chasseur se regardent tous deux ;
« L’un, puissance féroce, et déployant entière
« L’impétuosité de l’ardente matière ;
« L’autre, sur son beau front, portant arec fierté
« Ce grand signe dont Dieu marqua l’humanité.
« Bientôt, d’un vaste^bond, le monstre vers sa proie
« S’élance… le lacet en sifflant se déploie,
« Le saisit, l’enveloppe aussi prompt que l’éclair,
» L’étouffé dans son vol comme un oiseau de l’air :
« Il tombe, et du chasseur l’arme miraculeuse
« Vibre et resserre encor sa morsure onduleuse.
« Ainsi des passions qu’il nous faut étouffer,
« L’âme, fille de Dieu, peut toujours triompher. »
A ces mots, Sémida sous la voix paternelle
S’inclina sans répondre… et moi je fis comme elle.