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effet, abandonne son cœur à mille inquiétudes exagérées ; au lieu de juger en homme sensé des nouveaux oracles par les anciens, il se livre à celui qui parle, dès qu’on parle des choses terribles. Puis donc que mes conseils ne gagnent rien, Apollon, dieu Protecteur[1], toi dont la statue s’élève devant ce palais[2], je viens, chargée de ces offrandes, t’implorer, afin que tu amènes une heureuse[3] issue aux terreurs d’OEdipe ; car nous tremblons tous, en le voyant éperdu, comme un pilote au milieu de l’orage.



UN MESSAGER.

Étrangers, pourrais-je savoir de vous où est le palais du roi Œdipe ? ou plutôt dites-moi où il est lui-même, si vous le savez.

LE CHŒUR.

Voici son palais, et tu l’y trouveras lui-même, ô étranger ; tu vois devant toi son épouse, la mère[4] de ses enfants.

LE MESSAGER.

Puisse-t-elle être heureuse et toujours entourée d’heureux, puisqu’elle est la digne compagne d’Œdipe !

JOCASTE.

Je fais les mêmes vœux pour toi, étranger ; car tu le mérites par ton langage obligeant. Mais dis-moi ce qui t’amène en ces lieux, et ce que tu viens nous annoncer ?

LE MESSAGER.

D’heureuses nouvelles pour ton époux et pour ta famille, ô femme !

  1. Voir la note sur le vers 203, troisième antistrophe du premier Chœur.
  2. Voir la note sur le vers 16, scène I. Bothe pense que les mots άγχιστος γάρ εί indiquent plutôt le temple d’Apollon Isménien, qui s’élevait sur la place publique de Thèbes.
  3. Εὐαγῆ, pure et sainte ; c’est-à-dire qui nous montre Œdipe pur du crime qui lui est imputé.
  4. Γυνὴ δὲ μήτηρ le rapprochement de ces deux mots, qui expriment la situation réelle de Jocaste auprès d’Œdipe, n’est pas sans intention.