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nettement la légitimité et l’utilité de la guerre... N’est-ce pas inattendu et déconcertant, du moins de la part de Soloviev ? Auparavant, il a écrit bon nombre de pages contre le prestige et les abus de la force. Maintes fois, il a répudié les systèmes de contrainte employés chez les peuples civilisés et surtout la peine de mort. Même il admettait (et il admet encore dans ses dialogues) que le développement universel du militarisme peut un jour (mais non pas de la façon que supposent nos pacifistes) aboutir à la suppression des armées, par effet de réaction et d’épuisement ; affaire de temps aussi. Alors, comment s’imaginer Soloviev théoricien de la guerre ? Est-ce croyable ?... Oui ; et même pour des raisons assez simples.

Chrétien si fervent, chrétien si éclairé, le philosophe russe ne pouvait, un seul instant, méconnaître que l’existence des individus et de la société se résume dans la lutte du bien et du mal. Il savait parfaitement, toujours il a déclaré et prouvé que la justice a le droit d’employer la force. Son grand ouvrage la Justification du Bien a, sur la guerre, un chapitre ou celle-ci est représentée comme un instrument de civilisation. Elle est un mal... mais un mal relatif. Elle