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extérieur de répandre la Bible ou des livres de prières et de sermons parmi les Nègres et les Papous. Ce n’est là qu’un moyen pour le vrai but, qui est de mettre l’humanité devant le dilemme : d’accepter ou de rejeter la vérité en connaissance de cause, c’est-à-dire la vérité bien exposée et bien comprise. Car il est évident que le fait d’une vérité acceptée ou rejetée par malentendu ne peut pas décider du sort d’un être raisonnable. Il s’agit donc d’écarter non seulement l’ignorance matérielle de la révélation passée, mais aussi l’ignorance formelle concernant les vérités éternelles, c’est-à-dire d’écarter toutes les erreurs intellectuelles qui empêchent actuellement les hommes de bien comprendre la vérité révélée. Il faut que la question d’être ou de ne pas être vrai croyant ne dépende plus des circonstances secondaires et des conditions accidentelles, mais qu’elle soit réduite à ses termes définitifs et inconditionnés, qu’elle puisse être décidée par un pur acte volitif ou par une détermination complète de soi-même, absolument morale, ou absolument immorale. Maintenant, vous conviendrez sans doute que la doctrine chrétienne n’a pas atteint actuellement l’état voulu, et qu’elle peut encore être rejetée par des hommes de bonne foi à cause de réels malentendus théoriques. Il s’agit donc :

1º D’une instauration générale de la philosophie chrétienne, sans quoi la prédication de l’Évangile ne peut pas être effectuée ;

2° S’il est certain que la vérité ne sera définitivement acceptée que par une minorité plus ou moins persécutée, il faut pour tout de bon abandonner l’idée