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un monde de souvenirs agréables mêlés à des pressentiments plus agréables encore. Je soufre de nostalgie cosmopolitique. Le patriotisme n’empêche pas d’être gêné par les frontières. C’est pour cela que j’adore la mer, qui n’en a pas.

Il faut cependant que je vous explique ma lenteur à répondre, ainsi que l’insuffisance de ma lettre.

En dehors des préoccupations qui ne sont pas faites pour une communication postale et des travaux littéraires accidentels, j’ai deux travaux quotidiens, qui m’absorbent plus qu’il ne faut peut-être.

1º Je publie un gros volume sur la philosophie morale, qui sera suivi par deux pareils sur la métaphysique et l’esthétique, dont une moitié est sous presse tandis que les derniers chapitres sont encore in statu nascenti.

2º Je rédige la section philosophique et en partie théologique d’une énorme encyclopédie russe (lettres A-L) parue en trente-cinq volumes, deux mille feuilles d’impression, trente-deux mille pages ; la plupart des articles de ma section sont écrits par moi-même, et la lettre M, à laquelle nous sommes arrivés, est infernale : matière, matérialisme, manichéisme, métaphysique, mystique, morale, monisme, monothéisme, monophysite, monothélite, mandéens, Maimonide, Malebranche, Mill, et un tas de termes russes que je vous épargne. Maintenant, je profite de deux ou trois jours un peu plus libres, entre Malebranche et Matière, pour vous répondre d’une manière très incomplète.

Je savais déjà quelque chose sur le mouvement anglo-romain par la Quinzaine, que l’on m’envoie