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et à plusieurs journaux. Le mérite supérieur de tout ce qu’il écrivait, sa célébrité, la curiosité et la sympathie qu’il inspirait, tout cela rendait ses travaux productifs. Il aurait pu vivre tranquillement et avec un peu de confort. Mais c’était bien le moindre de ses soucis ! Il avait un grandiose mépris des calculs personnels dont se compose si souvent l’existence dite pratique. Il ne put jamais s’astreindre à la régularité d’un domicile ordinaire. Une partie du temps, il logeait chez l’un ou l’autre de ses amis innombrables. Ce qu’il aurait pu économiser ainsi passait aux domestiques, sous forme de pourboires princiers. Ou bien, il habitait dans un hôtel. Là, une foule de solliciteurs l’assiégeait. Littéralement, il se laissait dépouiller de tout, même du temps si précieux dont il avait si grand besoin pour son labeur. Il faisait des courses et des démarches au profit de besogneux indiscrets. Il avait dans les rues toute une clientèle qui le rançonnait. Sa famille et ses amis essayaient vainement de le garantir contre l’incroyable exploitation dont il se rendait victime. Pour faire quelque large aumône, il allait jusqu’à emprunter de l’argent, qu’il remboursait par la production d’un travail supplémentaire.