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toute sa magie ne fut d’aucun secours. Les Juifs coururent vers Jérusalem, effrayés et tremblants, suppliant le Dieu d’Israël de les sauver. Quand la ville sainte fut devant leurs yeux, un grand éclair entrouvrit le ciel, depuis l’est jusqu’à l’ouest. Et ils virent le Christ, qui descendait vers eux, en robe royale, avec les plaies des clous sur ses mains étendues. Alors, du Sinaï vers Sion, s’ébranlait la foule des chrétiens, conduits par Pierre, Jean et Paul ; et de différents côtés aussi accouraient d’autres foules enthousiastes : c’étaient tous les Juifs et tous les Chrétiens que l’Antéchrist avait mis à mort. Ils revivaient ; et ils commençaient à régner avec le Christ, pour une période de mille ans.

C’est par ce tableau que le père Pansophii voulait terminer sa narration, qui avait pour sujet, non pas l’universelle catastrophe de la création, mais seulement le dénouement de notre évolution historique : l’apparition, l’apothéose et la ruine de l’Antéchrist.

L’HOMME POLITIQUE. – Et vous pensez que ce dénouement est si prochain ?

M. Z… – Sans doute, il y aura encore sur la scène bien des bavardages et des vanités ; mais ce drame-là est, depuis déjà longtemps, écrit tout entier jusqu’à la fin ; et ni les spectateurs, ni les acteurs n’auront le droit d’y faire aucun changement.

LA DAME. – Mais, en somme, quel est le sens de ce drame ? Je ne parviens pas à comprendre pourquoi votre Antéchrist a tant de haine pour la divinité, puisque, au fond, il est bon et non mauvais ?

M. Z… – C’est que, précisément, il n’est pas bon