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sourire allongea légèrement les belles lèvres du grand homme. Plus de la moitié des savants théologiens s’avancèrent vers l’estrade, avec, toutefois, un peu de lenteur et d’hésitation. Tous regardaient le professeur Pauli, qui semblait enraciné à son siège. Il baissait profondément la tête, se repliant et se contractant. Les savants théologiens qui étaient montés sur l’estrade se sentirent envahis par la confusion. L’un d’eux, tout à coup, agita la main, sauta droit en bas à côté de l’escalier et, boitant un peu, courut rejoindre le professeur Pauli et la minorité qui restait là. Pauli leva la tête, se mit debout d’un mouvement un peu incertain, puis se dirigea vers les bancs abandonnés et, suivi de ses coreligionnaires qui résistaient à l’empereur, vint s’asseoir près du père Jean, près du pape Pierre et de leurs fidèles.

Sur l’estrade se trouvait la grande majorité du concile, y comprise presque toute la hiérarchie de l’Orient et de l’Occident. En bas restaient seulement trois groupes de gens qui s’étaient rapprochés les uns des autres et qui se serraient autour du père Jean, du pape Pierre et du professeur Pauli.

D’une voix attristée, l’empereur leur adressa la parole : « Que puis-je encore faire pour vous ? Hommes étranges ! Que voulez-vous de moi ? Je l’ignore. Chrétiens répudiés par la majorité de vos frères et de vos chefs, condamnés par le sentiment populaire, dites-moi vous-mêmes ce qui vous est le plus cher dans le christianisme ? » Alors, pareil à un cierge blanc, le père Jean se dressa. Avec douceur, il répondit : « Grand souverain ! Ce qui nous est le plus cher