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comment pourrais-je vous rendre heureux ? Que dois-je vous donner, non comme à mes sujets, mais comme à mes coreligionnaires, à mes frères ? Chrétiens ! Dites- moi ce qui vous est le plus cher dans le christianisme, afin que je puisse diriger mes efforts de ce côté. »

Alors, il s’arrêta et attendit. Dans le temple flottait un murmure étouffé. Entre eux, les membres du concile se parlaient à voix basse. Le pape Pierre, gesticulant avec ardeur, expliquait quelque chose à ceux qui l’entouraient. Le professeur Pauli agitait la tête et faisait claquer ses lèvres avec acharnement. Le père Jean incliné vers un évêque et vers un capucin d’Orient, leur adressait doucement quelque suggestion. Après avoir un peu attendu, l’empereur, de nouveau, harangua le concile, toujours sur un ton caressant, où vibrait une note d’ironie à peine perceptible. Il dit : « Chers chrétiens. Je comprends combien il vous est difficile de me répondre d’une manière directe. Je veux vous y aider. Vous êtes, malheureusement, de date immémoriale, émiettés en sectes et en partis divers, de telle sorte que, peut-être, il n’y a point parmi vous un seul objet d’inclination qui vous soit commun. Mais si vous ne pouvez vous accorder entre vous, j’espère mettre d’accord tous vos partis en leur montrant à tous le même amour et la même disposition à satisfaire la vraie tendance de chacun. Chers chrétiens ! Je sais que beaucoup d’entre vous, et non les moindres, apprécient surtout dans le christianisme l’autorité spirituelle qu’il donne à ses représentants légitimes. Il la leur donne, non pas pour leur propre avantage, mais, assurément, pour l’intérêt général, puisque