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D’autres allaient plus loin, affirmant qu’il était le véritable Jean, c’est-à-dire l’apôtre Jean le Théologien, qui n’était pas mort et qui s’était manifesté dans les derniers temps. Lui-même ne disait rien de son origine ni de sa jeunesse. C’était maintenant un homme très âgé, encore robuste, avec la chevelure bouclée et la barbe jaunâtres et même verdâtres, de haute taille, au corps maigre mais avec des joues pleines et légèrement rosées, l’œil vif et brillant, une bonne physionomie et un langage qui respiraient l’onction. Toujours, il portait une soutane blanche et un manteau blanc. À la tête de la fraction évangélique du concile se trouvait le savant théologien allemand, professeur Ernst Pauli. C’était un petit vieillard sec, au front énorme, au nez pointu, au menton rasé et lisse. Ses yeux avaient un singulier caractère de bonhomie violente. À chaque instant, il se frottait les mains, secouait la tète, fronçait les sourcils d’une manière terrible, projetait les lèvres en avant ; et puis, les yeux étincelants, il proférait d’une voix morne des sons entrecoupés : so ! nun ! ja ! so also ! Il portait la tenue solennelle : cravate blanche et longue redingote pastorale avec plusieurs décorations.

Impressionnante fut l’ouverture du concile. Dans les deux tiers de l’énorme temple consacré « à l’union de tous les cultes » étaient placés des bancs et d’autres sièges, pour les membres du concile. Dans l’autre tiers se dressait une haute estrade, sur laquelle, derrière le trône de l’empereur et celui, un peu moins élevé, du grand mage cardinal, impérial chancelier, s’étendaient des rangées de fauteuils réservés aux ministres,